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Mélanie Rutten au Centre André François

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D’octobre à fin décembre, le Centre André François expose le travail de Mélanie Rutten. Co-construite par l’autrice et Monique Malfait-Dohet, présidente et conseillère scientifique du Fonds de l’image et du texte pour la jeunesse (Fondation Battieuw-Schmidt), cette exposition propose un parcours suivant la narration poétique et les jeux d’ombre et de lumière qui habitent l’œuvre de Mélanie Rutten. De nombreux originaux et des carnets de croquis permettent de plonger dans un univers peuplé de plantes et d’animaux, mais aussi de s’attarder sur les recherches de couleurs, les étapes de création des personnages, la mise en place des histoires. Un livret accompagne les plus petits pour entrer en jouant dans le monde de Mélanie Rutten. Les plus grands ne sont pas oubliés avec un catalogue mêlant textes et analyses.

Exposition La poétique de l’ombre, du 05 octobre au 28 décembre 2024, au centre André François. Entrée libre.
les mardi et vendredi de 14h à 18h / le mercredi de 10h à 12h et de 14h à 18h / le samedi de 10hà 17h.
Atelier pour enfants Fabuler en automne, le 11 octobre.
Conférence de Monique Malfait-Dohet « L’esprit du Père Castor plane-t-il sur les carnets de croquis de Mélanie Rutten ? » le 28 novembre.
Ateliers pour tous, avec l’artiste, les 13 et 14 décembre.
Finissage le 14 décembre, en présence de Mélanie Rutten.

 

Escale tchèque pour L’œil du monde !

Un enfant, un livre, une bibliothèque et une maison d’édition d’ailleurs : c’est la recette de L’œil du monde.

L’œil du monde est un projet un peu fou, imaginé par Christine Morault et les éditions MeMo, à Nantes, en France. Nous sommes très fier·es d’avoir Kitty Crowther pour marraine de L’œil du monde. Tous les ans, pendant des années, Christine a retrouvé ses ami·es éditeur.ices qu’elle a rencontré·es, à Bologne, à la Foire internationale du livre pour enfants. Ce sont de petites maisons d’édition comme MeMo, indépendantes, éditant peu, des livres de qualité plutôt qu’en quantité, collaborant sur le long terme avec des auteur·ices et des artistes partageant les mêmes valeurs.

Porté par la maison Baobab, Oko do Svĕta est basé sur un partenariat mêlant des bibliothèques, des auteur·ices, des éditeur·ices et des illustrateur·ices. Artistes et maisons d’édition de République tchèque et d’autres horizons se promèneront dans tout le pays grâce à une bibliothèque mobile. Rendez-vous est donné dans les bibliothèques, les galeries et les écoles pour des ateliers, expositions et conférences sur des sujets variés comme la géographie, le langage ou l’illustration. À Tábor, du 5 au 7 septembre, durant le festival Tabook, Oko do Svĕta met en lumière les artistes ainsi que les bibliothèques associées au projet dans le cadre de rencontres professionnelles, d’ateliers, d’expositions et de lectures.

Tabook œil du monde

 

Retrouvez (en tchèque) le calendrier des événements !
Paul Cox, Jakub Plachy, Joëlle Jolivet, Blexbolex, Eva Volfová, Kitty Crowther, Magdalena Rutova, Junko Nakamura, Maria-Chiara di Georgio… un programme pléthorique !

Huit livres pour observer la nature

Que l’on soit tout petit ou plus grand, une sélection de huit livres pour ouvrir les yeux sur la nature qui nous entoure !

 

Flânez aux côtés de Cy, le lépidoptère rêveur de Janik Coat dans Papillon d’été.

Dans ce monde

Grandir et contribuer à perpétuer la planète, c’est la tendre évocation de Malika Doray Dans ce monde.

La nuit est tombée, munissez-vous de vos lampes et découvrez la faune qui s’active dans Une nuit au jardin d’Anne Crausaz.

Sous le soleil

Lombric, mésange, coléoptère, lézard ou encore figue, devinez qui mange qui dans Sous le soleil, d’Ariadne Breton-Hourcq et Laurence Lagier, album mêlant poésie, jeu de formes et chaîne alimentaire. Distingué par la Foire internationale de Bologne !

Goéland et gobie en bord de mer, cincle et ablettes sur les berges, promenez-vous le long des eaux avec Eau salée et Eau douce, les deux ouvrages d’Émilie Vast.

Quand le soleil s’installe enfin, Chnourka et ses amis s’activent au potager, se promènent dans les bois et récoltent les premiers fruits. Mais cet été, ils vont aussi apprendre à en découvrir plus sur la nature humaine, avec l’arrivée du nomade Justin.

Pombo courage

Quel meilleur poste d’observation qu’une cabane perchée dans les arbres ? Oui, mais l’été et ses orages s’en mêlent parfois… Alors êtes-vous plutôt l’intrépide Java ou Pombo Courage ?

Dans l’immensité de l’océan, il y a toute une faune à observer… une faune qui reçoit souvent des choses bizarroïdes venues du ciel. Et si cette fois, c’est la faune qui nous observait ? Renversez vos points de vues dans La chose du MéHéHéHé.

 

Quand Etienne Delessert et MeMo cheminaient ensemble

Etienne Delessert était né le 4 janvier 1941 à Lausanne. Il est décédé le 21 avril 2024 à Lakeville (Connecticut), entouré de sa femme bien-aimée, Rita Marshall, directrice artistique de Creative education, et de leur fils Adrien. Sa carrière et sa vie se sont déroulées entre sa Suisse natale, Paris et les États-Unis où il s’est installé en 1985.

Delessert

Sans doute fut-il l’un des plus grands « illustrauteurs » du siècle écoulé, non seulement par l’importance quantitative de ses publications (quelque 80 albums pour la jeunesse, livres pour adultes, abondante contribution, si originale, à la presse internationale, nombreuses affiches percutantes, charmants films d’animation dont le célébrissime Yok-Yok…) mais aussi parce que, dès les années soixante et septante, il a révolutionné le regard porté sur l’édition illustrée et n’a eu de cesse, jusqu’à son dernier souffle, de défendre ardemment sa conception idéaliste des arts graphiques. Sans concession. Avec enthousiasme. Avec une connaissance très sûre du monde de l’édition. Avec une solide culture de l’image. Avec le souci de partager son expérience. Avec une vitalité qui a épuisé beaucoup de ses partenaires de travail (dont je suis!), qui, en outre, ont eu à essuyer ses colères, ses exigences, sa ténacité, son désir de perfection, son besoin d’absolue exclusivité, ses avalanches de courriels, ses coups de fil intempestifs qui ne tenaient pas toujours compte du décalage horaire… C’était un travailleur infatigable, acharné, toujours en quête du meilleur et j’ai beaucoup appris à ses côtés. C’était aussi un ami très attentionné qui, alors que j’ai vécu une longue et pénible hospitalisation, m’a très fidèlement entourée, quotidiennement, de son affection et de ses encouragements.

 

Trois albums testamentaires

Dans la dernière décennie de création d’Etienne Delessert, les éditions MeMo ont joué un rôle important dans la promulgation d’œuvres de très grande qualité, alors que les éditeurs historiques qui l’avaient autrefois promu, les Grasset ou les Gallimard, boudaient une œuvre qu’ils jugeaient désormais élitiste et trop exigeante, à mille lieues des productions banales qui encombrent les étals des libraires : l’air du temps, contre lequel il a beaucoup vitupéré. Son style n’était pas passé de mode comme d’aucuns l’ont jugé un peu rapidement, il était hors mode, d’une aura universelle.

Ce n’est pas par hasard si, pour publier trois œuvres intimistes, Etienne Delessert a choisi MeMo : il admirait les choix éditoriaux de cette maison et le soin extrême porté à la fabrication de l’objet-livre. Charismatiques, nourries de ses souvenirs et particulièrement émouvantes (Un verre en 2013, Cirque de nuit en 2015 et Fourru Bourru en 2016), ces trois histoires avaient d’ores et déjà été publiées aux États-Unis, par sa femme, Rita Marshall, aux éditions Creative.

Un verre

La mère naturelle d’Etienne, Bérengère de Mestral, mourut d’une pneumonie alors qu’il n’avait que deux semaines. Un verre raconte la relation du petit orphelin avec Églantine Besson, la gouvernante que, alors qu’il n’avait que deux ans et demi, son père engagea et qu’il épousa quelques années plus tard.  Elle fut, écrit-il, sa « vraie mère ». Pleine de tendresse attentionnée, conteuse inspirée, elle nourrit à jamais l’imagination de ce gamin éveillé et sensible. L’album qui lui est dédié est d’une grande simplicité, presque prosaïque, plein d’émotion contenue, à mille lieues des fantasmagories luxuriantes et parfois inquiétantes qui habitent son univers. Les souvenirs évoqués sont précis, solidement imprimés dans la mémoire affective de l’enfant, à jamais inoubliables.

Delessert un verre

 

Cirque de nuit

Cirque de nuit, qui parut deux ans plus tard, est, de loin mon livre préféré. C’est une œuvre testamentaire s’il en est, qui égrène, au fil des pages, tous les souvenirs, toutes les obsessions d’une existence, avec une maîtrise picturale exceptionnelle. La référence autobiographique y est clairement assumée car il y peint son auto-portrait ainsi qu’une très belle effigie de Rita. Les choses de la vie à l’aune de l’appel de la mort. Il y a du Roi des aulnes ou de La Jeune fille et la mort, dans cette suite musicale à la fois chatoyante et mélancolique où défilent les animaux réalistes ou fantasmés de ses livres, ses réminiscences religieuses (les anges) ou littéraires (Ionesco, Beckett et Kafka), ses clowns, nains et musiciens nostalgiques, happés vers l’ailleurs d’une bougie à la lumière vacillante. Il les suit dans l’acceptation sereine et mystique des fins dernières après une destinée bien remplie. Un livre essentiel, subtil pendant graphique de L’Ours bleu, autobiographie parue chez Sladkine en 2015. Le 23 avril, l’Ambassade de Suisse à Paris organisa, pour la sortie de ces Mémoires d’un créateur d’images, une soirée qui se termina par la présentation du film d’animation qu’Etienne Delessert a réalisé à partir de notre Cirque de nuit, mettant ainsi l’accent sur les liens sémantiques qui unissent l’album de MeMo à sa biographie.

Cirque de nuit

 

Fourru bourru

Etienne Delessert est remarqué dès son premier album paru en 1967 chez Harlin Quist à New York, Sans fin la fête, hommage fantaisiste de ce fils de pasteur nourri de récits bibliques à l’incontournable Arche de Noé. C’est d’ailleurs à la même époque que, dans sa Bible très hollywoodienne, John Huston interprète ce patriarche débonnaire, si bienveillant avec les hôtes de son zoo flottant. Mais, à l’inverse du film, on est loin d’une catéchèse sulpicienne. Et on sent la jouissance de l’artiste à représenter ce joyeux bestiaire.

Cette thématique de l’Arche de Noé, il la reprendra un demi-siècle plus tard avec Fourru Bourru. Cette fois, l’inspiration est beaucoup plus personnelle, résolûment anticonformiste, et l’audace graphique, avec sa gamme chromatique étendue et l’originalité de ses plans, dépasse largement celle de Sans fin la fête. Lors du Déluge, c’est dans la toque à grelots d’un ours généreux que les animaux trouvent un refuge saugrenu. On y perçoit l’amour profond des bêtes que Delessert nourrit depuis son enfance, et aussi son étonnante identification à l’ours. Rappelons-nous que ses mémoires s’intitulent L’Ours bleu, et qu’il a largement diffusé auprès de ses amis les photos des ours qui viennent familièrement s’inviter dans son jardin de Nouvelle Angleterre. Jubilatoire !

Fourru Bourru

 

 

Comment la souris…

Les éditions MeMo, fidèles à leur engagement patrimonial, ont réédité en 2018, l’un des livres mythiques d’Etienne Delessert, Comment la souris reçoit une pierre sur la tête et découvre le monde. Né de la collaboration du jeune artiste avec le célèbre phénoménologiste Jean Piaget, il s’interroge, à partir d’expérimentations pédagogiques, sur la réception et la compréhension des enfants face à un livre complexe et poétique. D’un charme et d’un lyrisme captivants, l’album, indémodable, exprime l’engagement écologique d’Etienne Delessert, l’amour de la nature qui lui fut transmis par son père, sa fascination pour le soleil et la lune, sa soif d’harmonie cosmique. L’extase, quasiment métaphysique de la souris, qui découvre les merveilles de la vie est exprimée avec une touchante naïveté. Dans la postface que Christine Morault a eu l’amitié de me confier, je parlais alors d’« efflorescences esthétiques enracinées dans le terreau des mythes », car c’est cet ancrage dans la cosmogonie universelle qui en fait un « grand livre ».

L’album parut d’abord aux États-Unis puis en France à l’école des loisirs en 1971, et fut alors tiré à 60 000 exemplaires et traduit en six langues. Mais on ne trouvait plus désormais ce petit chef d’œuvre que chez de rares bouquinistes. La version MeMo, particulièrement bienvenue, au papier si élégant, reprend la maquette d’Herb Lubalin et comble ce manque dans le paysage éditorial en faisant renaître avec brio un grand classique du livre d’enfance.

Comment la Souris

 

 

Merci à MeMo d’avoir édité ces quatre livres d’exception dont la profondeur psychologique et métaphysique nous rappelle, s’il en était besoin, qu’Etienne Delessert ne fut pas seulement, comme ses nécrologies dans la presse le martèlent, « le papa de Yok-Yok ».

Janine Kotwica, le 8 mai 2024.

Etienne Delessert (1941-2024)

Cirque de nuit

Etienne est parti avec son Cirque de Nuit.

Avec une grande tristesse, nous avons appris le décès d’Etienne Delessert, un immense artiste du livre que nous avons eu l’honneur et le grand plaisir d’éditer. Nous avions publié plusieurs de ses livres parus pendant des années chez son éditeur américain, The Creative Company mais surtout nous avions pu rééditer un livre très important historiquement, Comment la souris reçoit une pierre sur la tête et découvre le Monde, dans la magnifique mise en page de Lubalin. Des histoires puissantes et des dessins de toute beauté.

Mais le plus testamentaire est donc ce Cirque de Nuit, qui voit défiler la longue vie d’Etienne et ses sources d’inspiration : Kafka, Beckett et Ionesco, un lion, des acrobates, un alligator, un musicien qui lui joue un air familier, cette caravane qui quitte la nuit et s’enfonce dans une douce lumière, et cette dernière phrase : « Et c’est ainsi que j’ai suivi mon cirque de nuit. »

Etienne est parti, ces pages magnifiques nous accompagnent. Nous présentons nos condoléances très amicales à Rita Marshall, son épouse et à tous ses amis, de ce côté-ci et de ce côté-là de l’Atlantique.

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