Dans sa pratique photographique, Patrick Tosani propose une confrontation de l’homme et de la chose. Il s’empare pour cela d’objets familiers afin de les rendre à leur étrangeté. Une transformation peut être exercée directement sur les choses, comme ces chemises qui sont empesées dans une forme circulaire où viennent s’inscrire des visages d’enfants. Mais c’est surtout dans le processus photographique que s’opère la mise à distance : le changement d’échelle notamment extrait l’objet du lieu où il est situé, pour en faire notre vis-à-vis.

Les éditions MeMo ont coédité avec le Frac des Pays de la Loire le catalogue de l’exposition « Au-devant des images » consacrée à Patrick Tosani. La forme du livre, dans le défilement des représentations photographiques qu’elle propose, permet de prolonger la déambulation du spectateur dans l’espace de l’exposition, où le regard est invité à circuler d’un mur à l’autre, à considérer successivement les photographies qui l’entourent ; la sensation reproduite ici n’est pas celle du corps qui se déplace, mais des images qui tournent autour de lui, à sa périphérie. Le regard est cerné par des représentations d’objets. Et ces objets lui renvoient leur étrange regard d’objet, comme celui des masques formés par des pantalons rigidifiés, qui supplante dans les dernières images le regard des enfants précédemment évoqués, eux-mêmes déjà gagnés par la réification.

Patrick Tosani, en donnant à voir ainsi les vêtements, nous rappelle qu’ils sont au quotidien le prolongement de notre enveloppe corporelle, l’ « interface avec l’espace, entre le corps et l’espace ».  Leur reproduction à l’identique est impossible, car la photographie, en occultant le sens du toucher qu’ils sollicitent habituellement, les rend essentiellement visibles. En les faisant accéder à cette frontalité, Patrick Tosani interroge à la fois leur présence, et le pouvoir de représentation des images.